Fichage ADN : Harcèlement judiciaire

Le 25 juillet 2014, Patrick est verbalisé par la gendarmerie pour détention et usage de stupéfiants (en l’occurrence des pieds de cannabis). Au cours de son audition à la gendarmerie, il refuse de se soumettre au prélèvement ADN. Il comparaît au tribunal de Mende le 2 octobre 2014, écope de 600 € d’amende pour le cannabis et est relaxé pour l’ADN.

Le procureur général fait immédiatement appel de la décision. Patrick est convoqué à la cour d’appel de Nîmes le 28 mai 2015, il est cette fois-là condamné à 1000 € d’amende pour le cannabis et à 2 mois de prison avec sursis pour le refus de prélèvement ADN. Il dépose un pourvoi en cassation, le 26 novembre 2015, sa demande d’aide juridictionnelle est rejetée, il dépose un recours contre cette décision, qui sera rejeté le 22 mars 2016. Ne pouvant payer un avocat en cassation, Patrick dépose un mémoire personnel le 27 avril 2016. Le 4 juin 2016, le conseiller rapporteur émet un avis défavorable, le pourvoi en cassation est définitivement rejeté le 5 octobre 2016, la condamnation en appel est donc validée.

Le 17 novembre 2017, Patrick est une nouvelle fois convoqué à la gendarmerie pour se soumettre au prélèvement ADN, il refuse encore. Le 14 décembre 2017, il reçoit un courrier lui ordonnant de payer son amende de 1000 € ainsi que 380 € de frais de justice. Le 25 janvier 2018, il est convoqué au tribunal en vue d’une comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC). Après avoir consulté son avocat, il refuse la CRPC.

Le 5 avril 2018, il est convoqué pour une audience en correctionnelle au tribunal de Mende.

Le refus de prélèvement ADN : un délit perpétuel

Non content de condamner les gens pour refus de prélèvement, l’État s’arroge par la loi la possibilité de réclamer de nouveau l’ADN de la personne dans un délai d’un an après exécution de sa peine. Si elle refuse encore de se soumettre, cette personne s’expose aux mêmes poursuites judiciaires qu’auparavant, avec bien sûr l’aggravation pour récidive.

L’acharnement de l’État à remplir le Fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG) par tous les moyens (près de 3 millions de personnes fichées à ce jour) est bien révélateur des enjeux réels de ce fichier : le contrôle des populations pauvres et/ou « déviantes », marginalisées par le rouleau compresseur de l’économie capitaliste.

Le FNAEG est relié, grâce au super-logiciel AJDRCDS (Application judiciaire dédiée à la révélation des crimes et délits en série), à l’ensemble des différents fichiers policiers et judiciaires (80 en 2011, dont 45 non légiférés) et à tous les fichiers d’administration publique ou privée (Pôle Emploi, CAF, MSA, Impôts, Sécurité sociale, Base Élèves, opérateurs téléphoniques, banques, etc.). Il participe ainsi à ce maillage, de plus en plus serré, d’informations collectées, grâce à la massification de l’électronique et d’internet (les réseaux sociaux sont également passés au crible).

Les différentes lois antiterroristes de ces dernières années renforcent cet arsenal de contrôle. La loi d’octobre 2017 sur la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme en est le dernier acte.

L’État exerce une surveillance incessante sur nos vies

Il s’agit de préserver les valeurs essentielles qui fondent et entretiennent les inégalités sociales : respect de l’autorité, propriété privée, travail, morale bourgeoise. Son rôle n’est autre que de défendre la classe des possédants, ses intérêts et ses valeurs.

Ce ne sont pas les dérives d’un système qui glisserait vers un autre (fasciste ou totalitaire), c’est l’État démocratique qui adapte sa gestion de la population aux impératifs économiques, et développe des technologies de contrôle de plus en plus totalisantes qui, à leur tour, deviennent des marchés juteux.

Aujourd’hui, beaucoup sont écrasés et n’arrivent pas à relever la tête sous le poids de la machine judiciaire, chacun essaie de gérer son affaire au mieux tant que c’est possible. La frénésie législative de cette dernière décennie, en augmentant le nombre de crimes et délits, a logiquement augmenté le nombre de prévenus à la barre des tribunaux.

Actuellement, de plus en plus de gens résistent, refusent le fichage et font appel, parfois avec succès, à la Cour européenne des droits de l’homme (affaire Ayçaguer).


Le refus d’être enregistré dans le FNAEG est un acte d’insubordination et de protection face à la logique du fichage génétique.

Luttons pied à pied, collectivement, pour faire reculer cette loi liberticide. Des solidarités sont à construire et à multiplier pour sortir de l’isolement et du cloisonnement dans lesquels le système cherche à nous maintenir.

Lutter sur le seul terrain juridique ne suffit pas, des rapports de force sont à construire, en multipliant les mobilisations, en faisant circuler l’information, en organisant ensemble la résistance.

Ne nous laissons plus faire !

Rassemblement de soutien le 5 avril à 14h
devant le tribunal de Mende

Les procès à répétition coûtent cher, les soutiens financiers sont aussi les bienvenus.

carapace30@riseup.net

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